Titus Welliver - Parade (Octobre 2023)

Paulette Cohn : Bosch est un homme compliqué, un peu grincheux. Après 10 ans, qu'est-ce qui vous donne encore envie de jouer ce rôle ?

Titus Welliver : Harry est très ancré dans ses habitudes. Il n'évolue pas. On ne le trouvera jamais dans une retraite de méditation à Topanga ou en train d'écouter de la musique new age pour essayer de trouver son centre. Mais il ne s'ennuie jamais, c'est ça le truc.

Comme je l'ai dit à Mike Connelly, j'aime tous les livres, mais j'apprécie vraiment les livres dans lesquels Harry est plus âgé. Dans le dernier livre, Desert Star, c'est un homme plus âgé. Et pourtant, alors qu'Harry est piégé dans le corps d'un homme plus âgé, il n'est que mémoire musculaire. Et le problème avec Harry, c'est que plus il vieillit et plus il se sent vulnérable, plus il devient dangereux.

La seule chose qui reste vraie chez Harry, c'est son sens moral : Tout le monde compte, ou personne ne compte. Êtes-vous à la hauteur ?

J'en suis convaincu. J'ai été élevé de cette manière. Et je m'identifie à son éthique de travail et/ou à sa nature obsessionnelle dans la façon dont il aborde ce qu'il fait. J'ai moi-même tendance à agir de la sorte dans tous les aspects de la création artistique, qu'il s'agisse de jouer la comédie, de peindre ou d'écrire. Je comprends cela. C'est ce qui le nourrit et lui permet d'aller de l'avant. Quand vous le retirez de la police, il doit toujours faire quelque chose, donc être un détective privé. Quand il obtient ces affaires, elles commencent par une chose et, bien sûr, dans le domaine typique de Harry Bosch, elles se développent jusqu'à ce qu'elles deviennent des enjeux très importants.

Que ressentez-vous à l'idée que Michael Connelly vous ait vu dans la série Touch et qu'il ait vu Bosch en vous ?

Je ne serais pas sincère si je disais que je n'ai pas été profondément touché. C'est le maestro et c'est son caractère. Pouvoir plaire au maître, faute d'un meilleur mot, me plaît beaucoup, beaucoup. L'une des premières choses que Mike m'a dites, c'est : "Y a-t-il quelque chose que tu voudrais faire différemment ? Y a-t-il quelque chose qui ne va pas ?" Je lui ai simplement répondu : "Écoutez, quand ce n'est pas cassé, ce n'est pas la peine de le réparer."

Il est évident que nous devons reconfigurer certaines choses. Les livres ne sont pas chronologiques et nous retrouvons Harry au milieu de sa carrière plutôt qu'au début. Nous devons donc l'avancer, changer son âge, etc. Mais j'ai dit que le personnage, dans son essence, est ce qui est important pour moi. Il s'agit de servir le personnage.

Vous avez subi des pertes à un jeune âge : votre petite sœur, votre frère, votre belle-mère. Harry a également perdu sa mère à un jeune âge. Ce lien vous aide-t-il à trouver qui il est ?

Je n'utilise jamais les expériences de ma vie réelle pour m'émouvoir dans une série. J'ai découvert très tôt que cela signifiait que je ne jouais pas, que je revivais un traumatisme émotionnel et que je cessais alors de jouer. J'ai senti que ce n'était pas sain pour moi.

Mais je comprends tout à fait la situation dans laquelle se trouve Harry et son traitement prolongé de cette perte et de ce traumatisme. Harry est un homme très prudent et la personne la plus proche de lui, il la garde. Je comprends cela, j'ai des enfants. Je n'ai jamais été ce que j'appellerais un parent hélicoptère, mais je pense que lorsque vous subissez le traumatisme d'une perte, cela vous rend craintif, extrêmement observateur et prudent. C'est certainement ce que je partage avec Harry. J'ai dit récemment à ma femme : "Peut-être que je perds la tête, peut-être que je suis vraiment Harry Bosch en fin de compte, peut-être que c'est juste qu'il est resté en sommeil. Je me promène, mais je n'ai pas d'insigne ni d'arme".

Qu'est-ce que cela fait à Bosch d'être à la retraite dans l'affaire Legacy ?

Je pense que dans une certaine mesure, Harry s'occupe lui-même. Il n'est pas doué pour rester inactif et s'asseoir dans cet espace. Il s'occupe de sa maison [qui a besoin de réparations] et n'est donc pas dans son nid d'aigle. Il est dans son petit bureau et cela l'isole dans une certaine mesure. Lorsqu'il est sur son perchoir, c'est là qu'il se sent en sécurité. Maintenant, il est au sol. Comme nous l'avons découvert dans la première saison, cela le rend vulnérable.

Bosch est un grand amateur de jazz. Cela vous a-t-il converti ?

Je n'ai pas une connaissance encyclopédique du jazz comme Mike Connelly, mais j'ai grandi en écoutant toutes sortes de musiques et beaucoup de jazz. Mon père était ami avec beaucoup de grands musiciens de jazz. J'ai donc eu le privilège de les rencontrer et de les voir jouer dans des endroits comme le Blue Note. J'ai donc toujours aimé le jazz. Mais le jazz fait partie intégrante de la personnalité de Harry. Nous avons un personnage, Mo, qui est tout aussi obsédé par le jazz. Lui et Harry ont des échanges amusants sur la musique. La musique revient donc plus au premier plan qu'elle ne l'était à l'origine, ce qui me réjouit. Parce que c'est vraiment le rythme de Harry.

Avant Bosch, vous étiez probablement plus connu sous le nom de l'Homme en noir, alias le monstre de fumée de Lost. Que représente cette série pour vous ?

J'étais fan bien avant d'y jouer, elle était très originale. C'est une très bonne histoire. Je pense que Damon et ses collaborateurs ont fait un travail remarquable en créant ces personnages. Au début, ils ne pouvaient pas me dire quel serait mon personnage ; je devais signer en toute bonne foi. Je n'ai vraiment compris que lorsque j'ai tourné une scène avec Néstor Carbonell où il dit : "La fumée noire a pris ma femme", et mon personnage répond : "Non, non." Il me dit : "Comment le savez-vous ?" J'avais une réplique géniale où je disais : "Je suis la fumée noire." Lors de la répétition, Néstor secouait la tête. J'ai dit : "Quoi ? Quoi ?" Il m'a dit : "Tu es si calme." J'ai dit : "Quoi ?" Il a dit : "Dire que je suis la fumée noire. C'est comme dire 'Luke, je suis ton père'." C'est alors que j'ai compris.

Comment était-ce de travailler avec Ben Affleck, avec qui vous avez fait quatre films ? Avez-vous été son porte-bonheur ?

J'avais dit que j'étais sa patte de lapin et qu'il devait m'avoir dans ses films, sinon il y aurait un problème au box-office. J'ai donc reçu le surnom de "patte de lapin".

Je suis arrivé pour Gone Baby Gone et le scénario était incroyable. C'était l'une de ces choses où je voulais vraiment ce rôle. Mais j'avais l'impression d'être 10 à 15 ans trop jeune pour le jouer. Je ne me suis pas découragée, mais lorsque je l'ai rencontré, il était tellement chaleureux, charmant et brillant que j'ai eu encore plus envie de le jouer. Lorsque j'ai été choisie pour le rôle, j'ai été ravi.

Il y a toujours des gens qui se montrent très prétentieux : "C'est un acteur qui réalise son premier film et bla-bla-bla". Je dois vous dire que lorsque j'étais sur le plateau, et certainement lorsque Ben m'a montré son premier montage, je me souviens m'être dit : "Oh, mon Dieu, ce n'est pas le travail d'un réalisateur débutant. Il pourrait s'agir de son cinquième film, de son dixième ou de son vingtième. C'est un homme extrêmement intelligent, extrêmement bien préparé, qui sait comment parler aux acteurs, comment parler aux directeurs de la photographie. Il a tout le film en tête. C'est un homme très holistique de ce point de vue.

De plus, malgré la quantité de travail, de temps et de patience que cela implique, c'est un plaisir énorme de travailler avec lui. Ces séries sont un pur plaisir. Comme il se doit. Si ce n'est pas amusant, ce n'est pas la peine de le faire. Oui, travailler avec Ben, ses expériences, je pense que, honnêtement, c'est probablement le meilleur réalisateur, certainement dans le domaine du long métrage, avec lequel j'ai jamais travaillé.

Maintenant que vous avez connu le succès en tant qu'acteur, vous avez repris le pinceau.

Lorsque nous quitterons le Zoom, j'irai directement à mon studio. Je suis dans le Connecticut, chez moi, et j'ai un studio dans une grange. Je peins et j'expose mes œuvres depuis des années. La boucle est bouclée.